Histoire
Il n'était pas là à l'accouchement. Mon père je veux dire... Je me souviens seulement vaguement de son visage. Je crois qu'il avait la peau matte et des cheveux bruns, comme les miens. Ma mère me parlait toujours de lui avec une certaine nostalgie dans la voix et dans le regard, même après que je lui ai dis quel genre d'homme il était vraiment.
À chaque fois que je lui demandais comment elle pouvait encore l'aimer et l'attendre, assise dans son fauteuil,
elle souriait tristement en me répétant que personne n'était parfait et qu'il reviendrait vers elle quand il se serait lassé de l'autre.
Je n'arrivais pas à comprendre pourquoi elle lui pardonnait encore. Je ne le comprends toujours pas pour être honnête. Vous n'arrivez pas à comprendre tout ce que je raconte ? Asseyez-vous, que je vous raconte depuis le début.
Il était une fois une femme magnifique du nom de Cha Xin. D'origine chinoise, elle avait déménagé à Philadelphie alors qu'elle n'avait qu'une vingtaine d'année. Professeur d'Aïkido, elle travaillait dans un dojo qui lui payait bien ses leçons.
Un jour elle rencontra ce qu'elle pensa être son prince charmant. Beau, riche, PDG d'une entreprise et célibataire, il avait tout pour plaire. Après un ou deux ans de relation, une petite fille naquit du nom de Jia Li.
Si vous aviez pas compris, c'est moi la petite fille.
Pas de chance, le papa était en déplacement professionnel ce jour là. La mère décida de l'appeler Jia Li. Elle porta le nom de famille de son père "Liang". Cha Xin décida immédiatement qu'elle suivrait sa voie : une experte en art martiaux, mais en mieux. Elle étudierait la boxe et le judo en plus.
L'enfance de la petite fille se déroula sans accrocs. Si sa mère était présente derrière chacun de ses mouvements, son père lui tenait plus du fantôme que d'un être humain. Présent moins d'une semaine sur deux, il était constamment en "voyage d'affaire". En y repensant, ça me fait bien rire tiens. Enfin bref, l'histoire...
Les entraînements se déroulaient à la perfection. La petite Jia Li raflait absolument tout : les prix, les compétitions, les ceintures... Le seul problème était sûrement son caractère. Elle n'était pas intéressée par les relations sociales. La gamine restait toujours dans son coin et ne jouait pas avec les enfants de son âge. On la prenait à tord pour une enfant introvertie quand elle avait juste aucun intérêt dans la sociabilisation.
Elle grandit encore et encore, gagnait plus de prix, devenait plus violente, sauvage et extrême dans ses combats. Sans pitié, "le génie" se transforma peu à peu en "monstre" frappant à chaque fois où ça fait le plus mal.
Puis, la seule personne pour laquelle elle éprouvait de l'affection tomba malade. Sa mère, atteinte d'un cancer, n'avait plus la force de bouger. Quand son Prince l'apprit, il s'évapora. Si d'abord, Cha Xin pensait que c'était uniquement à cause d'un long voyage, une fois plusieurs semaines passées, l'inquiétude commença à déformer ses traits.
La gentille petite Jia Li, alors âgée de dix-sept ans, se mit à la recherche de son père. Cependant, aucune trace de lui. C'est lors d'une compétition qui se déroulait à New York qu'elle le croisa, par pure hasard, au détour d'une rue. A son bras, une autre femme que sa mère qui se mourrait à Philadelphie et avec eux, un enfant qui lui ressemblait trop pour croire qu'il n'était pas de lui. Il était un peu plus âgé que Jia Li, peut être d'une dizaine d'année, un peu moins ? Tout les trois rigolaient.
Jia Li qui d'habitude contrôle si bien ses émotions, vit rouge. Littéralement. Son sang battait douloureusement dans ses tempes alors qu'elle s'avançait vers eux d'un pas rapide. Elle sourit alors qu'elle admirait l'expression apeurée de son père. Sans préavis, elle le gifla si fort que la marque de sa main s'est incrustée sur la joue de son père.
Elle rigolait d'une manière, il faut le dire, un peu effrayante. Elle fit une petite révérence, mimant le fait d'étirer une jupe alors qu'elle ne portait que son survêtement et se présenta à la seconde famille de son père.
" - Jia Li Liang, fille de Cha Xin Zhou et du déchet qui vous sert de compagnon, Madame. Heureuse d'avoir fais votre connaissance. "
Sans attendre son reste, elle s'enfuit en courant avec qu'on ne puisse la rattraper et rentra chez elle sans même participer à la compétition.
Quand elle l'annonça à sa mère, cette dernière la gifla en pleurant avant de la prendre dans ses bras. Visiblement, elle s'en doutait. Cette nouvelle ne fit qu'accélérer sa mort et c'est un peu après les dix huit ans de Lia Ji que Cha Xin quitta ce monde. Avec un peu de recul, je me dis que c'est mieux qu'elle soit morte maintenant plutôt qu'elle ait assisté à tout ça.
C'est au même moment que Jia Li décida de m'engager dans l'armée. Sans aucun autre diplôme que ses médailles, qui n'étaient d'aucune utilité pour trouver un travail, elle choisit l'option facile. Elle rentra en tant que soldat de l'armées des États-Unis d'Amérique le jour de ses dix-neuf ans.
Elle n'eût cependant pas le temps de profiter de cette délicieuse violence gratuite qu'étaient les guerres parce que la fin du monde commença peu après. La lèpre, la mort, la peste peut être même ?
Quoi qu'il en soit, elle, elle ne tombait pas malade. Elle voyait ses coéquipiers mourir les uns après les autres et elle ne versait jamais une larme. Elle se demandait juste quand serait son tour.
Alors que le monde fut presque entièrement décimé en moins d'un mois, elle, elle vivait et elle se sentait plus en forme que jamais !
Par terre, dans une ville fantôme, elle trouva un petit bout de papier. Un appel aux survivants, aux immunisés. Des coordonnées au dos, un message appelant à la reconstruction. Si Jia Li se satisfaisait d'être seule, elle n'avait cependant pas assez de vivre pour survivre bien longtemps.
Habillée de son treillis, son sac à dos suspendu à ses épaules, son arme à feu en main, elle se dirigea d'un pas assuré vers le soit-disant dernier bastion de l'humanité.
Là bas, des gens l'accueillaient le sourire aux lèvre. Sourire qu'elle ne réussit pas à retourner. Elle s'ennuyait déjà. Avec sa dégaine, la femme qui s'occupait de la répartition ne prit pas longtemps pour décider de quel groupe elle ferait partie. Elle serait à nouveau un soldat, mais cette fois ci d'un état dans un monde à moitié anarchique. Pour la première fois, moi, Jia Li, souriait. Ça promettait d'être intéressant.